Qui ne s’est jamais rué sur une plaque de chocolat, un paquet de chips ou de biscuits après une dispute avec un proche, ou en rentrant du boulot? Si vous me répondez que ça ne vous est jamais arrivé… Je ne vous crois pas. ça m’est encore arrivé hier, de combler un besoin émotionnel par une sucrerie! Et cela arrive à tout le monde. Oui voici un grand scoop, on est tous logés à la même enseigne. Et c’est normal. Celui qui n’a jamais mangé par ennui ou par stress… a sûrement déjà utilisé l’alimentation pour répondre à un besoin tout sauf physiologique… Dans ce cas nous répondons à un besoin émotionnel.
La nourriture au départ répond à un besoin physiologique. Cela devrait être simple: j’ai faim ou je n’ai pas faim. Mon corps a besoin d’énergie, ou pas. L’apport énergétique devrait être en rapport avec mes besoins physiologiques.
C’est une belle théorie, mais dans la réalité c’est souvent différent. Comme la différence entre les livres et la “vraie vie”.
On en a parlé de plus en plus ces dernières années de l’alimentation émotionnelle. On peut citer le célèbre Jean-Philippe Zermati avec son livre « Osez manger, libérez vous du contrôle ».
Vous en avez marre de grignoter à la moindre contrariété? De culpabiliser après avoir englouti un paquet de biscuit pour calmer vos nerfs? Vous aimeriez comprendre pourquoi la nourriture vous apaise et retrouver une alimentation sereine? Vous aimeriez retrouver un rapport à la nourriture sain et apaisé?
Dans cet article, j’aimerai vous proposer de comprendre pourquoi nous avons tendance à manger pour faire face à une émotion. Vous donner des clefs pour apprendre à observer ce qui se passe en vous. Et pourquoi pas à trouver des alternatives. Vous apprendrez à observer si un cercle vicieux s’est installé concernant la nourriture. J’espère que vous y trouverez des clefs pour comprendre si vous êtes dans le cas d’une alimentation troublée ou d’un trouble alimentaire.
Pour vous parler de ce sujet passionnant, Ariane Garcia, psychologue spécialisée en TCA (Troubles du Comportement Alimentaire) nous donnera son avis d’expert. Marina Champagne de Nourrisanté, témoignera de son changement d’alimentation pour des raisons de santé. Elle vous montrera comment elle a fait de la nourriture un allié plutôt qu’un ennemi du bien.
L’alimentation émotionnelle, de quoi parlons-nous?
La définition de l’alimentation émotionnelle est le fait de moduler la consommation alimentaire en réponse à un ressenti émotionnel plutôt qu’à celui de la faim ou de la satiété. De rajouter que pour réguler nos émotions avec la nourriture on se dirige préférentiellement vers des aliments riches en sucre et en graisse et que cela peut poser notamment d’autres questions sur la place de ces produits dans notre alimentation.
Ce qui est intéressant de se demander c’est si cette envie de manger répond à un besoin physiologique ou non? Loin de moi l’idée de vous dire qu’il est anormal de manger en dehors de ces besoins physiologiques. On peut aussi en consommer… par plaisir par exemple 😉 Ou par besoin de partage… Partager un bon gâteau pendant un repas par exemple est une source de joie sociale. Ce n’est pas physiologique, et pourtant c’est Oké. Vous me suivez?
L’idée ici ce serait plutôt de se demander: est-ce que j’utilise la nourriture pour combler un besoin émotionnel de façon répétée, inadaptée, et systématique?
Les émotions: le stress, la tristesse, la culpabilité, l’ennui, …
Chaque émotion que nous ressentons a une fonction. La peur aide à la survie, à percevoir les dangers. La tristesse permet d’obtenir du réconfort. Le stress nous permet de nous mettre en action s’il est “bon”. Le stress nous est délétère si notre seuil de bon stress est dépassé. Selon notre vécu, nos apprentissages, notre éducation… Nous ne gérons pas tous de la même manière nos émotions. D’ailleurs pour certains, elles ne sont pas gérées. Pas accompagnées. Elles sont enfouies, ignorées. Ce qui est d’ailleurs le meilleur moyen pour se les reprendre (un jour) dans la tronche comme un boomerang. Mais bien sûr, on n’apprend pas cela à l’école. A la maison non plus, la plupart du temps… C’est en train de changer doucement… J’en suis ravie, vous vous en doutez.
Quand vos émotions sont ignorées, ou qu’elles sont enfouies (choisissez, la politique de l’autruche: vous pouvez soit mettre votre tête ou vos émotions dans le sable)… Elles vont vous sembler plus gérables, puisque bien éloignées de vous, à court terme. A long terme, cela peut pourtant causer de la souffrance.
Pourquoi on mange quand on est stressé/triste/…: un mécanisme d’adaptation…
Et donc si parfois je n’écoute pas mes émotions, et les besoins qu’elles indiquent, je vais peut-être me réfugier sur autre chose pour gérer… Par exemple…Je vous le donne dans le mille… La bouffe! (Pour d’autres, cela pourrait être la consommation d’anxiolytiques, cannabis, alcool, sexe… Ce n’est pas le sujet du jour).
C’est alors qu’un cercle vicieux peut s’installer:
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Si par exemple je suis triste parce que mon copain m’a quitté et que je n’ai pas appris à reconnaître que j’ai besoin de réconfort, d’en parler, et d’accepter que oui bordel, ça fait mal… Je me rue sur la nourriture. C’est oké. On l’a tous fait!
Le hic c’est que parfois, combler un besoin par de la nourriture peut devenir automatique, fréquent. Et c’est à ce moment là que l’on va pouvoir commencer à s’interroger.
Limite entre une alimentation émotionnelle normale et pathologique
Avis d’Ariane Garcia, psychologue spécialisée dans les Troubles du Comportement Alimentaires
« Comme l’a très bien expliqué Betty précédemment, réguler ses émotions avec la nourriture est un comportement très répandu mais pas forcément problématique. De nombreuses études montrent que c’est un phénomène plutôt commun dans la population générale (Beck, Guilbert & Gautier, 2006 ; Bourdier, 2017). Manger est un moyen, parmi d’autres, de réduire le stress et les émotions difficiles. C’est une manière de « s’automédiquer » (Khantzian, 2003) et de se procurer du plaisir (Goodman, 1990).
Mais que se passe-t-il quand cette stratégie de régulation émotionnelle ne semble plus fonctionner ? Quand ce comportement s’accompagne davantage de honte et de dégoût de soi que de plaisir ou de réconfort ? Quand on a le sentiment d’être complètement incontrôlable face à ces aliments « doudou » ?
Pour commencer, il est important de rappeler que le comportement alimentaire est influencé de manière permanente et dynamique, par des facteurs biologiques, psychologiques et sociaux. Il ne peut se réduire à l’une de ces composantes.
Ainsi, je ne présente ici qu’une partie des hypothèses existantes sur un possible dysfonctionnement de l’alimentation émotionnelle, et me concentre principalement sur les facteurs psychologiques. »
Alimentation émotionnelle: une intolérance possible aux émotions difficiles?
Piste de réflexion livrée par Ariane Garcia, Psychologue spécialisée en Troubles du Comportement Alimentaire:
« L’alimentation émotionnelle peut devenir problématique quand elle est utilisée de manière systématique et compulsive pour gérer des éprouvés difficiles (émotions, sentiments pensées). L’utilisation préférentielle d’aliments gras, sucrés, salés et à forte valeur énergétique (Macht, 2008 ; Gibson, 2012), permet d’obtenir du réconfort et du plaisir de manière rapide, et ainsi, d’atténuer ces émotions difficiles.
Néanmoins, lorsqu’une personne éprouve une incapacité à tolérer ses émotions sans nourriture, nous pouvons observer un phénomène qui peut s’apparenter à de l’addiction alimentaire (Bourdier, 2017). Plus la personne anesthésie ses émotions avec la nourriture, plus son intolérance émotionnelle augmente et plus elle ressentira un besoin compulsif de nourriture pour les gérer (Zermati, 2015).
Si ce concept d’addiction alimentaire est encore largement discuté dans la littérature (Bourdier, 2017), il permet néanmoins de mettre en lumière que l’intolérance aux émotions difficiles pourrait être une cause possible de dysfonctionnement de l’alimentation émotionnelle. »
La réstriction cognitive et ses conséquences
Pour vous en parler d’un comportement répandu et pourtant cause possible d’une alimentation troublée… Je laisse la parole à Ariane Garcia, psychologue spécialisée en Troubles du Comportement Alimentaire:
« La restriction cognitive (Herman & Mack, 1975), est une attitude qui amène la personne concernée à contrôler, voire à réduire, son alimentation dans le but de perdre du poids ou pour éviter d’en prendre (Le Barzic, 2001). Les conséquences de cette restriction cognitive sont nombreuses et susceptibles d’influencer l’alimentation émotionnelle.
Zermati (2011) parle notamment de « trouble du réconfort » lorsque la restriction cognitive empêche la nourriture émotionnelle d’être satisfaisante et fonctionnelle. En effet, manger devient une activité stressante pour une personne en restriction cognitive. Elle ressentira beaucoup de honte et de culpabilité à avoir mangé, sans faim, des aliments riches/gras/sucrés.
De fait, l’alimentation émotionnelle ne peut plus remplir sa fonction de régulation des émotions et cette personne aura besoin de manger de plus en plus pour gérer cet inconfort émotionnel. Ce besoin de manger devient alors compulsif et irrépressible, c’est la compulsion alimentaire. Là encore, un cercle vicieux psychologique s’installe et l’alimentation émotionnelle devient un comportement dysfonctionnel.
Par ailleurs, la restriction cognitive peut amener la personne à résister à ses envies de manger émotionnelles. Cette lutte ne fera qu’engendrer davantage de honte, de culpabilité et de sentiment d’impuissance, particulièrement si elle finit par manger, et ainsi, renforcer ce dysfonctionnement.
Les relations entre émotions, comportements alimentaires et restriction cognitive sont très complexes. Par ailleurs, la restriction cognitive semble engendrer des comportements qui « miment » l’addiction alimentaire (Apfeldorfer & Zermati, 2017). C’est à dire que plus une personne se privera d’un aliment (généralement gras/sucré/industriel) pour contrôler son poids, plus le désir de cet aliment augmente, ce qui peut engendrer un sentiment de perte de contrôle intense et des compulsions alimentaires.
Enfin, une étude de Tan, Ruhl et Chow (2016) a montré que le désir de manger augmente chez l’enfant lorsque les parents ont recours au « nourrissage de réconfort » (calmer la détresse émotionnelle de l’enfant avec la nourriture) et au contrôle alimentaire (interdiction/limitation d’aliments considérés comme mauvais pour la santé, surveillance du régime alimentaire…). Ce qui nous permet de supposer que la tendance à l’alimentation émotionnelle, associée à de la restriction cognitive, pourrait créer un « terrain » propice à une alimentation troublée, voire, aux troubles du comportement alimentaire. »
Gérer les envies de manger, grignotages, pulsions alimentaires, …
La prise de conscience: est-ce que je mange mes émotions?
Ce que je vous propose dans un premier temps consiste à vous observer. Si besoin, tenez un petit journal. Notez vos “dérapages” , les moments où vous avez mangé sans avoir réellement faim. Cela pré suppose que vous ayez à repérer bien sûr les sensations de faim.
Tenez ce petit journal sur une semaine.
Commencez à repérer s’il y a des situations qui se ressemblent, qui ont des points communs. Qu’est ce que vous remarquez en relisant votre journal?
Observer ses émotions
Chaque émotion a une fonction et vous renseigne sur un besoin qui n’est pas comblé. Ainsi, on pourrait se sentir triste quand on a besoin de réconfort. On pourrait avoir peur pour se protéger d’un danger (réél ou non).
L’émotion est utile et présente pour nous chuchoter à l’oreille un besoin qui n’a pas été respecté.
On pourrait par exemple se sentir en colère quand notre besoin de calme n’est pas respecté. Elle nous pousse à agir pour s’isoler, ou faire cesser le bruit. Si nous n’écoutons pas l’émotion… Nous pourrions utiliser la nourriture pour faire faire l’émotion désagréable. Au lieu de répondre au besoin sous jacent!
Si vous avez des dificultés à observer et à nommer vos émotions… Pas de panique. Cela s’apprend. Pour vous y aider, je vous ai préparé une petite liste d’émotions à laquelle vous référer pour commencer ce travail.
Observer ses pensées et les situations qui déclenchent la pulsion
Dans les situations que vous avez noté ou repéré y a t-il des choses que vous vous êtes dites qui auraient pu déclencher le besoin de compenser par la nourriture?
Par exemple en rentrant du travail: “pfff quelle journée. Je suis vidée” → tiens si je m’envoyais du nutella à la petite cuillère.
Observer ses habitudes et réactions
Qu’ai-je tendance à faire lorsque je suis face à une émotion? Quel comportement ai-je? Qu’est ce que je fais? J’ignore, je chasse de mon esprit (ex: je fais quelque chose pour occuper mon esprit)? Je mange?
Mettre en place une alternative à la nourriture
Et si quand vous rentrez du travail, crevée ou stressée, vous trouviez une autre alternative qui vous fait du bien?
Je ne sais pas vous, mais personnellement je dis toujours que j’ai 2 journées. Celle de travail, et celle quand je rentre. Je rentre le soir et j’ai à coeur de m’occuper (et profiter) de mon enfant en bas âge. Je l’aime, et c’est parfois du sport (les parents me comprendront sûrement). Les journées où j’ai eu beaucoup de stress, plutôt que me ruer sur le chocolat (à ce stade, vous l’avez compris, c’est mon pêché mignon)… J’ai négocié avec mon mari et mon enfant (oui oui) pour prendre une douche express. 5 mins RIEN QU’À MOI. Besoin (de calme) comblé sans culpabilité. Youpi.
On croit souvent à tort que trouver des solutions prend du temps. En fait, même si l’on en a l’impression… C’est plutôt qu’on n’en prend pas le temps. Et pourquoi? Parce que cela nous coûte des efforts de changer nos habitudes. Et si on ne sait pas pourquoi on le fait, ce sera encore plus difficile de le faire.
Demandez vous: qu’est ce qui fait que cette situation vous pose problèmes aujourd’hui? Qu’est ce qui est difficile? Et si vous ne faites rien pour cela, qu’est ce que cela aura comme impact pour vous demain?
Imaginez qu’avec quelques efforts, un changement, une aide… Vous solutionnez ce problème. A quoi ressemblera votre vie dans le futur? Qu’est-ce que vous y gagnez?
Développer d’autres sources de plaisir et réconfort
Dans ma pratique professionnelle, j’ai remarqué que souvent la nourriture était utilisée comme moyen de réconfort.
Les études nous ont montré que le fait de ne pas ressentir de plaisir dans notre quotidien est dépressogène. On pourrait très bien combler cette forme de tristesse par l’alimentation. Mais ce n’est qu’un exemple…
Les études faites sur cette notion (on parlera d’activation comportementale comme technique pour accompagner la dépression) disent que pour conserver une humeur positive, il faudrait au moins UNE source de plaisir TOUS LES JOURS !
Est-ce que vous y êtes?
J’aimerai vous inviter à explorer cette piste si ce n’est pas votre cas.
Exercice pratique d’observation de ses émotions/pensées/habitudes face à la nourriture
Pour faire le point sur votre comportement lié à la nourriture, je vous propose de tenir un petit journal pendant une semaine.
Dans votre journal, notez:
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la date / l’heure
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la situation dans laquelle vous êtes (ex: je rentre du travail, je suis devant la tv le soir, …)
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l’émotion que vous ressentez à ce moment là
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ce que vous vous dites à ce moment là, vos pensées
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votre comportement: ce que vous mangez par exemple, en réponse à l’émotion (globalement. C’est pas un journal pour votre diététicienne…)
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ce que cela a comme conséquence pour vous
Exemple de l’exercice d’alimentation pour répondre à un besoin émotionnel
- Date/heure: mercredi après-midi, 14h.
- Situation: j’écris le présent article.
- Emotion: je ressens un peu de stress, j’ai un besoin de performance et d’efficacité, car j’ai un timing à respecter pour vous proposer cet écrit.
- Mes pensées: j’ai la croyance erronée que le sucre me donnera un coup de boost, m’aidera à me concentrer… ah ah.
- Mon comportement: je vous écris donc avec un carré de chocolat (excellentissime) dans la bouche.
- Conséquence à court terme: Plaisir! Punaise ce que ça fait du bien. A long terme: c’est sûr qu’avec le confinement et tout ce que j’écris, je vais m’en enfiler un paquet. Mais cela n’a pas de conséquences néfastes dans le sens où je le fais en parfaite conscience, pas de façon systématique ni récurrente.
A vous de jouer.
Témoignage d’une jeune femme ayant revu entièrement son alimentation pour raison de santé.
Notre rapport à l’alimentation peut être un moyen de nier ses émotions, mais aussi ses douleurs parfois. Pour illustrer un processus de changement dans le rapport à l’alimentation, j’aimerai vous proposer un témoignage inspirant d’une amie.
Marina est la fondatrice de NourriSanté (alimentation sans gluten et sans lait pour retrouver une vie sans douleurs). Marina est une jeune femme à qui on avait appris à ne pas écouter sa tête, son coeur, son corps. Un jour, elle subit des douleurs intenses qui la font se questionner sur son alimentation. Petit à petit elle apprend à “écouter”. Et entame tout un processus de changement et cheminement que je trouve inspirant. Voici son témoignage:
« Tout a commencé en octobre 2018… Quand j’ai du faire attention aux douleurs de mon corps pour la première fois ! Suite à une crise de panique je me retrouve avec une névralgie. C’est quand vos nerfs se « coincent » et ça fait vraiment mal… J’avais des fourmillements dans les bras et jambes côté droit. Après avoir fait des examens, il s’est avéré que je souffrais notamment d’une légère arthrose au niveau des cervicales.
Mais la vérité c’est que je n’étais pas du tout une personne à l’écoute de son corps et / ou de ses émotions. J’ai toujours eu tendance à repousser les émotions, parce que je crois que dans mon éducation les accueillir c’était plutôt pour les faibles. Alors quand t’es hypersensible c’est compliqué ! Je crois vraiment que j’ai été éduqué pour me dépasser, et donc dépasser la douleur ! J’étais plutôt une personne à se dire que ça allait passer quelque soit la douleur. Pendant des années aussi, j’ai été en surpoids parce que je ne faisais pas réellement attention à mon corps et je mangeais ce qui me faisait plaisir sans penser aux conséquences à long terme. Ce qui rejoint ma propension à ne pas faire attention à mon corps, mes douleurs ou à essayer de contenir mes émotions.
Cette crise de panique a été comme un révélateur. Vu la douleur, je me suis dit qu’il était temps que je fasse quelque chose. J’ai donc bouquiné et j’ai décidé de tenter un changement d’alimentation radical. Plus de produits laitiers, plus de café, plus de gluten.
Bien sûr je n’ai pas tout fait en même temps sinon je crois que c’est la santé mentale que j’aurai perdue ! Mais j’étais déterminée. Quand la douleur est trop grande, je crois que c’est là qu’on est le plus déterminé à agir.
Donc petit à petit, un pas après l’autre, j’ai repris en main mon alimentation.
J’ai arrêté le café, j’ai introduit plus de légumes chaque jour, et j’ai enlevé tous les fromages et autres… Arrêter le café m’a rendue très fière car j’étais une addict ! J’ai ensuite stoppé le gluten, ce qui a été plus difficile car ce truc là se cache partout. L’idée derrière tout ça était de s’approcher du régime hypotoxique qui fonctionne bien pour l’arthrose. J’ai appris à manger des trucs que je ne mettais jamais dans mon assiette, comme le chou rouge par exemple, ou les épinards. Et chose incroyable : ces aliments là, que je détestais auparavant, j’ai appris à les aimer ! Il faut d’ailleurs partie de mes préférés aujourd’hui.
En terme de conséquences, je dirai que si l’on parle uniquement de ce qui se voit, je dirai surtout la perte de kilos. Mais surtout à l’intérieur, j’ai puisé une très grande force pour avancer, et venir à bouts de toutes ces douleurs chroniques qui s’étaient installées sans que je ne m’en rende compte.
Aujourd’hui j’ai repris des activités physiques : le yoga et la marche à pied surtout. J’ai toujours des douleurs chroniques mais elles sont bien moindres, et je crois que ça ne peut aller que de mieux en mieux ?
Car j’ai aujourd’hui le sentiment que chaque jour j’évolue dans mon intérêt, et donc forcément dans l’intérêt de mon corps. Mon état d’esprit est franchement différent.
J’ai l’habitude de dire que c’est un cercle vertueux. Tu fais attention à ce que tu manges, donc à ce que tu mets dans ton corps. Et ton état d’esprit lui aussi change. Et petit à petit chaque jour tu deviens un peu plus fier de toi et de tes progrès. »
Alimentation émotionnelle et Troubles du Comportement Alimentaire (TCA)
Par Ariane Garcia, psychologue spécialisée dans les troubles du Comportement Alimentaire:
L’alimentation émotionnelle semble être impliquée dans tout le spectre des TCA (Bourdier, 2017). En effet, des études nous ont permis d’observer que les personnes atteintes d’anorexie mentale, de boulimie ou d’hyperphagie boulimique sont plus susceptibles d’avoir recours à l’alimentation émotionnelle (Ricca, Castellini & Fioravanti, 2012 ; Ricca, Castellini & Lo Sauro, 2009).
Néanmoins, la limite entre une alimentation émotionnelle normale et pathologique reste floue. Elle semble devenir particulièrement problématique chez les personnes concernées par la restriction cognitive et/ou l’intolérance émotionnelle, qui sont également deux facteurs de risque au développement de TCA.
Quand demander de l’aide ?
« Il n’est pas toujours facile de déterminer à partir de quand il devient important de demander de l’aide pour gérer ses envies de manger émotionnelles.
Néanmoins, je vous encourage à consulter un professionnel (psychologue, psychiatre, diététicien, médecin généraliste…), si vous présentez les signes suivants :
- Vous vous sentez obsédé par la nourriture, vous avez le sentiment d’y penser très régulièrement ou de manière permanente.
- L’alimentation génère des émotions/sentiments difficiles : anxiété, inquiétude, honte, dégoût de soi…
- Vous avez le sentiment d’être incontrôlable vis-à-vis de l’alimentation : besoin irrépressible de manger en l’absence de faim, incapacité à arrêter la prise alimentaire.
- Vous avez le sentiment de ne pouvoir réguler vos émotions qu’avec la nourriture.
- Vous avez par moment le sentiment d’anesthésier vos sensations/émotions/pensées avec la nourriture.
- Vous vous sentez régulièrement submergé par vos émotions.
- Vous ressentez une quelconque souffrance liée à l’alimentation et/ou à la gestion de vos émotions. »
Pour aller plus loin
Pour s’informer et lire, voici quelques références. Si vous avez des doutes, on ne le répétera jamais assez: consultez un professionnel de santé pour faire le point! Votre médecin traitant peut déjà évaluer avec vous le besoin de consulter un psychologue. Si vous préférez, dans un premier temps, vous pouvez aussi appeler un psychologue directement.
Lectures
Ce livre de Jean-philippe Zermati est une référence sur le sujet. Il s’adresse au grand public.
Bibliographie
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Apfeldorfer, G., & Zermati, J.-P. (2017). Addiction aux aliments, à un comportement alimentaire, restriction cognitive, conséquences. Pratiques en nutrition, 5236(52), 1. https://doi.org/10.1016/j.pranut.2017.09.005
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Beck, F., Guilbert, P., & Gautier A. (2006). Baromètre santé 2005. Paris : INPES.
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Bourdier, L., Berthoz, S., Romo, L., Ballon, N., & Brunault, P. (2017). Alimentation émotionnelle et addiction à l’alimentation. EMC – Psychiatrie, 0(0),1-8.
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Bourdier, L., Lalanne, C., Morvan, Y., Kern, L., Romo, L., & Berthoz, S. (2017). Validation and Factor Structure of the French-Language Version of the Emotional Appetite Questionnaire (EMAQ). Front. Psychol. 8(442). doi: 10.3389/fpsyg.2017.00442
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Gibson, E.-L. (2012). The psychobiology of comfort eating : implications for neuropharmacological interventions. Behav Pharmacol, 23, 442–60.
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Khantzian, E.-J. (2003). The self-medication hypothesis revisited: the dually diagnosed patient. Prim Psychiatry, 10, 47–8.
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Ricca, V., Castellini, G., & Fioravanti, G. (2012). Emotional eating in anorexia nervosa and bulimia nervosa. Compr Psychiatry, 53, 245–51.
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Zermati, J.-P. (2011). Stress et alimentation : le trouble du réconfort : site internet du GROS https://www.gros.org/stress-et-alimentation-le-trouble-du-reconfort